On sait, en effet, que l’auteur de la Divine Comédie vint à Venise comme ambassadeur du seigneur de Ravenna, Guido da Polenta. Il visite l’Arsenal. Il est tellement impressionné par le spectacle grandiose qui lui offrent le quais et les chantiers où se mêlent charpentiers et matelots, où les armuriers succèdent aux calfats, qu’il s’en inspire pour écrire un passage du chant XXI de l’Enfer:
Quale nell’Arzanà dè Viniziani
Bolle l’inverno la tenace pece,
A rimpalnmar li legni por non sani,
Che navicar non ponno e’n quella vece.
Chi fa suo legno nuovo e chi ristoppa ;
Le coste a quel, chi più viaggi fece :
Chi ribatte da proda, e chi da poppa,
Altri fa remi, e altri volge sarte ;
Chi terzeruolo e artimon rintoppa ;
Tal, non per fuoco, ma per divin arte
Bollia laggiuso una pergola spessa
Che inviscava la ripa d’ogni parte.
Comme l’hiver, dans l’Arsenal des Vénitiens,
la poix tenace bout pour calfater les vaisseaux endommagés,
et au lieu de naviguer ce qu’ils ne peuvent faire,
celui-ci remet sa coque à neuf
et celui-là étoupe les bords du bâtiment qui a fait de nombreux voyages.
Qui de radouber la proue, qui la poupe;
L’un prépare les avirons,
Et l’autre tord des haubans ;
Ou encore il répare les voiles de misaine et celles d’artimon.
Ainsi, non par le feu,
Mais grâce à un art divine
Bouillait en ce bas-fond
Une poix épaisse qui engluait la rive de toutes parts.